Simon et les pêcheurs, les fils de Zébédée, étaient au bord du lac. Ils rentraient de la pêche, fatigués et déçus. Toute une nuit sans rien prendre. Ils lavaient leurs filets. Et là, un peu plus loin, un homme était debout et, tout autour de lui, une foule de gens se pressaient en silence. Et l'homme leur parlait. Et les gens écoutaient. Ils buvaient ses paroles. Car il ne parlait pas comme le faisaient les scribes, les docteurs de la loi, qui rappelaient la doctrine, récitaient leurs leçons. Lui, il parlait du coeur. Comme s'il annonçait une bonne nouvelle. Simon tendit l'oreille.
Et puis voici que l'homme se tourna vers Simon. Bien que visiblement, il n'était pas pêcheur - charpentier, disait-on -, Simon, impressionné, décida qu'il ferait ce que l'homme demanderait. Et l'homme dit aux pêcheurs : "Ne restez pas au port, au chaud, dans vos églises, ni dans vos cathédrales ; ne vous retirez pas derrière vos grands livres, vos lois et vos principes ; cessez de faire reluire les cuivres du bastingage, de laver vos filets, de porter l'uniforme, fiers si l'on vous admire, votre bateau et vous ; avancez donc au large." Simon et les pêcheurs larguèrent les amarres.
Et alors, avec l'homme, ils partirent rejoindre les hommes et les femmes, de leur temps, de tout temps, où ils vivent, où ils peinent, où ils rient, où ils pleurent ; là où ils sont heureux, là aussi où ils souffrent; où ils se donnent la main, où ils se tirent dessus ; où ils sont fatigués de ne jamais gagner, déçus de ne rien prendre, tout comme là aussi où ils reprennent courage ; où ils luttent sans relâche et où ils démissionnent. Sans peur de se mouiller, Simon et les pêcheurs, et combien à leur suite, jetèrent leurs filets pour les sortir de l'eau.